Paroles de soignants - Témoignages des soignants

Être soignant, c’est accompagner, soulager, sauver… mais aussi affronter la mort. Un poids souvent invisible, rarement évoqué, qui laisse des traces. Certains résistent, d’autres s’effondrent, certains changent de voie, d’autres trouvent des ressources pour avancer. Ici, Paroles de soignants, c’est pour donner la parole à celles et ceux qui ont vécu ces épreuves. Parce que partager, c’est déjà commencer à guérir. Parce que comprendre, c’est aussi mieux aider.

Vous êtes soignant et vous souhaitez témoigner ?
Envoyez-nous votre histoire à l’adresse mail suivante en indiquant votre prénom, votre profession et votre code postal. Ensemble, faisons entendre ces voix trop souvent réduites au silence.

Une très belle initiative ! Merci Thibaud DAMY d’en parler si bien. Les conseillers en génétique sont confrontés à une autre forme de mort parfois difficile à appréhender : l’interruption médicale de grossesse (IMG). En effet, dans la représentation collective, la grossesse est synonyme de vie (et rarement, de mort), l’interruption de la grossesse est demandée par le(s) parent(s) et non spontanée et elle est presque quotidienne dans notre pratique. Comment sommes-nous accompagnées et quelles sont nos ressources sur ce sujet, dans notre exercice de CG ?
– une formation initiale incluant des modules d’enseignements avec des psychologues, des éthiciens, des médecins et conseillers en génétique exerçant en prénatal; une formation continue autour du deuil périnatal; une supervision de notre pratique une fois par mois par un conseillers en génétique ou un psychologue; un travail en équipe en lien avec les centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal.

J’ai été très touchée par votre démarche, car je pensais que cela touchait plus particulièrement les infirmières , les aides soignantes ou les HAS.
Je travaille dans les soins depuis 15 ans. 10 ans en tant qu’aide soignante à domicile et 5 ans comme infirmière.
Je me souviendrai toujours de l’événement qui m’ a fait arrêter le métier d’aide soignante.
Un jeune papa en fin de vie à domicile , sa petite fille lui dit au revoir et me demande comme je suis soignante, si elle allait revoir son papa à son retour de l’école.
Que répondre…., si je disais non …la petite aurait passé une mauvaise journée si je disais oui, elle aurait été dans l’espoir
Je savais très bien qu’à son retour il ne serait plus là.
Alors je lui ai dit , retournes le voir et dis lui tout ce que tu as sur le cœur ce matin, tout ce que tu te ressens, prends le dans tes bras, fais lui des bisous…. Je suis désolée mais c’est une question très difficile que tu m’as posée. Et je n’ ai pas de réponse à te dire sauf celle la, va l’embrasser et dis combien c’est un super papa.
Je suis sortie de la maison et j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Et j’ai dis stop …là, je ne peux plus. J’aimerais venir vous voir à Tours le 14 avril, pourriez me donner l’horaire ? Est ce une entrée libre ou est-ce qu’il y a une participation ?
Cordialement.
Bonne route à très bientôt

40% des patients décèdent a domicile. Qui les suit dans le cadre de l’HAD ou hors HAD ?
Leur medecin de famille qui sera parfois appelé pour «  la derniere consultation «  le certificat de décès,celle qui n’est théoriquement pas facturée de quelqu’un connu parfois depuis plusieurs décennies et même avec sa famille
Ces médecins qui ne s’appuient pas sur une équipe hospitalière pour partager leurs émotions retournent seul à leur exercice de cabinet individuel au mieux de groupe
Parfois on envoie n’importe quand ,jours fériés inclus et n’importe quelle heure un médecin généraliste de garde ou le Samu pour constater le décès de personnes inconnues chez eux dans des contextes et situations variées pour lesquelles on évalue parfois aussi d’autres paramètres : obstacle à l’inhumation,mort naturelle,nécessité que la police soit informé qui vont stocker ces images en mémoire. Et comment évaluer aussi l’impact au fil du temps?
Si on doit mieux former tous les étudiants en médecine dans cette prise en charge de la mort,on ne doit pas faire de clivage ville /hopital et associer vraiment tout le monde dans ce débat.

Bonjour Thibaud.

Je suis en vacances a St Gilles avec mon amie Mag.
Nous sommes amies depuis 1985.
Depuis, nous avons traversé et partagé bien des épreuves mais aussi de très bons moments …la vie.
Elle, a fait un gros burn out depuis le covid et est en longue maladie.
Elle se remet pas a pas, elle aussi .
 
Je lui ai parlé de ta démarche et cela l’a bcp touchée.
Libre a elle de te confier des souffrances …
Nous avons marché pour le plaisir et en soutien à ta démarche.
Un monsieur nous a interpellées, intrigué par l’autocollant .
Je lui ai expliqué la signification et a eu les larmes aux yeux.
Il a perdu son épouse il y a 2 ans ; elle a souffert mais a pu aller en soins palliatifs .
Elle était sage femme et parlait a son mari de ses souffrances vécues a l’hôpital face aux DC de mamans et / ou nouveaux nés.
 
Nous te sommes reconnaissantes plus que jamais pour ton combat contre le tabou de la souffrance des soignants ,et familles dans le deuil .
J’espère que tes ampoules se sont éteintes !!
Amitié sincère 
J’ai entendu sur les ondes ton initiative au sujet du retentissement/ressenti pour le personnel soignant (au sens large, incluant les docteurs !!) du décès des patients.
Je te remercie de soulever ce sujet largement sous-estimé et de militer pour que cela soit pris en compte dans les études médicales/paramédicales.
Sois assuré que je t’accompagnerai en pensée sur les routes de France.
Bravo et encore merci

 

Bravo, bravo et mille bravos de mettre en lumière ce sujet essentiel dans notre pratique quotidienne. Je suis infirmière et j’ai travaillé 14 ans en EHPAD, désormais je suis thanadoula et je sais combien il est difficile (du côté des soignants) de vivre la souffrance et la mort au quotidien ! J’admire votre démarche, je salue votre courage et votre détermination. Peut-être un jour cette marche prendra la direction de la Bretagne et ce sera un immense plaisir de vous rencontrer !
Je vous souhaite de merveilleuses rencontres et beaucoup de succès dans votre projet !
 
 
 

Bonjour,
Votre venue dans notre petite clinique où il n’y a pas de cardiologie, je suis gynécologue-obstétricien, je ne pouvais pas la rater. Alors je suis venue vous écouter entre 2 blocs, parce que oui il faut que l’activité continue.
Vous, un cardiologue, professeur, qui prenait votre bâton de pèlerin pour nous alerter sur l’impact que la santé, la mort de nos patients peut avoir sur nous. Est ce que je me suis autorisée un jour à réfléchir à ça? Forcément que ce qui arrive à mes patientes me touchent. J’ai la chance de faire partie d’une petite équipe et je crois qu’on arrive à partager nos émotions entre nous dans les coups durs, encore faut il oser le faire.
Beaucoup de vos phrases résonnent en moi mais le message que je retiens le plus c’est de savoir prendre le temps d’annoncer les mauvaises nouvelles aux patients et familles mais que le moment de ce temps doit être celui qui convient au professionnel de santé et qu’il faut s’accompagner de ses équipes dans ces moments là. J’ai appris que moi aussi je dois être prête à annoncer une mauvaise nouvelle.
Quelle chance de vous avoir rencontré, MERCI d’avoir pris de votre temps pour venir nous voir. Belle marche à vous.
Au plaisir de vous recroiser un jour.

Je suis  très touchée par votre démarche et vos mots à l’encontre de ce sujet si caché, si oublié aux détriments de tous nos collègues, et des familles
Infirmière de formation, je suis aujourd’hui formatrice pour adultes auprès des soignants jusqu’aux aidants de proximité à domicile : aides à domicile…
Un burn-out « après sida » m’a invité à aller visiter ce sujet de la mort, après un D.U deuils avec Alain de Broca, et d’autres formations, j’anime maintenant essentiellement ce thème,
Je suis sidérée des soignants meurtris, abimés, que je rencontre : personne à qui parler, « tu dois t’y faire t’en verras d’autres », et autres injonctions aussi stériles que dévastatrices,
Le temps consacré en IFSI sur le deuil et la mort est ridicule ! Le sujet n’est pas vendeur, loin s’en faut.
Je vous souhaite un beau chemin vers vous et vers nous,
Que les meilleures énergies vous portent

Bonjour 
Je suis responsable de services en hôpital à domicile. Les équipes que j’accompagne interviennent sur 70%  de prises en charges palliatives.
 
Ce sujet de l’impact de la mort sur les soignants …. et non soignants (assistant social diététicienne…) est véritable sujet dans notre quotidien et notamment comment accompagner au mieux nos équipes et libérer ce sujet au sein d’espace de discussion neutre.
temoignage-de-soignant
Je suis médecin généraliste depuis bientôt 25 ans, j’adore mon métier et pour rien au monde je ne ferai autre chose de ma vie, même si les conditions de pratique de ce si beau métier se détériorent à vue d’œil. 
Ta démarche m’a touché pour bien des raisons. 
Comment ne pas reconnaître dans ta démarche ce beau roman “Sur les chemins noirs” qui m’a accompagné pendant les soins et pendant la chimio quand je rongeais mon frein, privé momentanément de montagne. 
Quel courage de briser l’omerta ! La mort est un échec dans notre métier.  Bien qu’ineluctable, nous en faisons pudiquement et un peu lâchement le tour pendant nos études. 
Cela m’a coûté mon rêve,  celui de travailler dans les équipes du Samu en montagne avec l’hélicoptère. Celui que je voyais enfant  se poser sur le toit du CHU, en vacances, depuis la maison de mes grands parents. 
Cette vocation s’est abîmé contre les écueils des interventions pendant mon stage d’interne. 
Nous partions comme des cow boys. Nous revenions vidés par tant de violence routière,  tant de drames familiaux, tant d’injustice. Plus souvent perdants que héros.  Et jamais un échange, jamais une parole à propos de ces horreurs. 
Seule parfois une cigarette ,  partagée comme un sceau de silence.
J’ai finalement compris que j’y laisserait mes nerfs. Que je ne pourrais jamais faire de montagne sans repenser à tous ces drames. J’ai donc préféré après les urgences et le Samu, la voie de la médecine générale.
Bien plus tard, en écoutant un vieux moine bouddhiste dont j’admirais les recherches à la fois scientifiques et spirituelles, j’ai compris.  Matthieu Ricard, avec les mots si simples dont il a le secret, nous expliquait qu’il ne fallait pas confondre compassion et empathie. Il fallait “juste” ne pas souffrir avec le patient mais entendre sa souffrance.  Plus facile à dire qu’à faire! 
Certains de mes collègues se refugieaient dans l’hyper technicité de leurs examens pour ne pas entendre leurs patients. J’en ai eu à souffrir en tant que malade moi même.  
Cela a probablement changé ma relation en bien avec mes patients.  Être passé de l’autre côté du bureau peut avoir de bon côtés. Pas simple d’écouter et d’accompagner jusqu’au bout. 
J’essaie de pratiquer mon métier de soignant de mon mieux,  même si la maladie m’en éloigné trop souvent. 
Ta démarche sera probablement salvatrice pour beaucoup d’entre nous qui souffrent en silence. Peut être pourra t elle aboutir à un meilleur enseignement,  une meilleure prise en compte de la souffrance des soignants. Je le souhaite. 
En attendant,  je te souhaite “bons vents” sur ta route et toute la réussite possible dans ta démarche.